Le ciel bleu d'aujourd'hui rayonnait presque d'une note d'optimisme sur Boulogne-Billancourt, pourtant il imposait le recueillement et le silence. La synagogue d'abord, le cimetière ensuite, puis une exposition sur la fin du système concentrationnaire au rez de jardin de l'hôtel de ville furent autant d'occasions de nous rappeler et de nous interpeller sur la barbarie, sur le droit à la différence et sur notre devoir de mémoire... La pudeur exige que les mots ici se taisent mais qu'ils deviennent à nouveau des armes quand nécessaire. Et s'ils ne suffisaient, à nous d'être aussi déterminés que courageux. A l'heure où l'on siffle et bafoue le drapeau de la république déjà odieusement souillé à des époques troubles, pas facile de dormir du sommeil du juste... Juste, nous aurions tous envie de l'être au nom de l'être plus que du néant dans lequel les révisionnistes et fanatiques aimeraient nous plonger. "Lugubre anniversaire" comme l'a précisé le sous-préfet des Hauts-de-Seine lors de son discours, anniversaire quand même de ces six millions de lumières éteintes par l'horreur et que la mémoire se doit d'allumer pour l'éternité. Le poids de l'indicible pèse sur notre histoire et exige que l'oubli ne soit pas un nouvel outrage à cette humanité et cet humanisme que nous revendiquons tous...
Il y a 65 ans, au printemps de 1945, comme l’écrivit André Malraux, « la vraie civilisation,… la part de l’homme que les camps ont voulu détruire » triomphait de la vraie barbarie.
Les dernières citadelles où les nazis détenaient encore des survivants du génocide des Juifs et des Tsiganes, et des rescapés des camps de concentration, s’écroulaient.Ce furent des jours de bonheur et de tristesse pour les survivants. Des milliers de leurs camarades avaient disparu et, au moment même où ils étaient libérés, beaucoup d’autres, emmenés par les SS, agonisaient sur les routes d’Allemagne, dans des « évacuations forcées » et des « marches de la mort » qui n’avaient pour but que de supprimer les témoins de la barbarie.
En cette période anniversaire de leur libération, conscients de la dette qu’ils ont contractée envers les libérateurs, les survivantes et les survivants tiennent d’abord à exprimer leur reconnaissance envers les combattants des armées de la coalition antihitlérienne grâce auxquels la part de l’homme qui subsistait en eux fut préservée.
En ce jour de mémoire, nous voulons saluer et encourager toutes les initiatives qui vont dans le sens d’un monde de tolérance, de paix, d’amitié et de solidarité entre les hommes et les peuples. La construction d’une Europe unie et pacifique, l’Organisation des Nations Unies, les progrès d’un justice pénale internationale, et les multiples organisations non gouvernementales mobilisant une jeunesse ardente et généreuse, sont autant de signes d’espoir et de raison de croire en l’avenir.
Oui, nous croyons que le printemps refleurira et que l’humanité saura surmonter ses vieux démons, pour autant qu’elle tire les leçons de ses erreurs passées.
Ce message a été rédigé conjointement par
La Fondation pour la Mémoire et la Déportation (F.M.D.),
La Fédération Nationale des Déportés et Internés de la Résistance (F.N.D.I.R.),
La Fédération Nationale des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes (F.N.D.I.R.P.),
L’Union Nationale des Associations de Déportés, Internés Et Familles de disparus (U.N.A.D.I.F.),
l’Union Nationale des Déportés, Internés et Victimes de Guerre (U.N.D.I.V.G.).
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